Alors qu’étymologiquement, le mot domaine (dominium) signifie la puissance de la personne sur les choses et le mot propriété (proprietas), l’objet soumis au domaine, c’est pourtant le second qui a été retenu par les artisans de la codification du droit privé français pour désigner le « droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue ». La variation de sens entre les étymons et le vocabulaire législatif français invite à se pencher sur révolution sémantique de domaine et de propriété depuis leur apparition dans la langue française et à s’interroger notamment sur les motifs qui ont dicté le choix terminologique de l’article 544 du Code civil. Le premier constat est la polysémie acquise par le terme propriété, inscrite dans le Code civil et aujourd’hui encore de mise. En effet, s’il conserve un sens objectif si la propriété continue de désigner la chose appartenant en propre à quelqu’un, le mot s’enrichit aussi sous l’ancien droit d’une acception subjective, voire d’une dimension potestative. Résultat en partie de l’élaboration du concept de droit subjectif, le fait que la propriété exprime l’appropriation sous l’angle actif du sujet propriétaire ne suffit pas à expliquer la consécration du mot dans l’article 544. Les principales significations acquises avant la Révolution par le mot domaine y sont aussi pour beaucoup. En effet, son sens premier de héritage, fonds, son sens absolu de biens publics, son pouvoir d’évocation de la féodalité témoignent de son incompatibilité avec l’idée d’un droit du particulier de disposer de ses choses.
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